Texte : Florian Baudouin
Photos : Bente van der Zalm

En ce jeudi soir de fin mars, la tournée de la néo-zélandaise Aldous Harding, reine de la folk rêveuse, croise la route de l’Epicerie Moderne et donc bien évidemment la nôtre. Alors que le printemps commence à peine, on ne sait jamais trop comment se couvrir. C’est vrai que la dernière fois ils faisait frais, mais hier il faisait bon… Y’ a plus de saisons, ma bonne dame ! Mais ce dont on a la certitude, c’est que la douce Aldous saura remettre les pendules à l’heure et nous réchauffer un peu. Pour cette tournée, elle est accompagnée de H. Hawkline, auteur-compositeur-interprète gallois.

Après un léger couac pour récupérer nos invitations, nous voilà enfin dans la salle, alors que H. Hawkline a déjà commencé depuis un petit moment. On doit se trouver environ à la moitié de son set. Au moment où on arrive, le gallois est seul à la guitare, assis sur un tabouret, on a donc l’impression dans un premier temps d’avoir affaire à un singer-songwriter folk. Cependant, on remarque un radio cassette qui tourne à côté de lui et très vite, il va interpréter divers morceaux où des parties instrumentales seront envoyées en arrière-plan et sur lesquelles il chante et joue les parties de guitare. Le style vire alors à de l’indie pop à la Declan McKenna, avec l’utilisation de beaucoup de piano et de synthés, qui imitent notamment des cuivres. On a le sentiment général que les morceaux sont entrainants mais qu’ils gagneraient énormément à être interprétés par un groupe. Au moment de conclure, Hawkline marque une longue pause avant de dire qu’il ne trouve rien à dire pour finir le set, ce qui donne lieu à une séquence un peu gênante, puis il enchaîne sur le dernier morceau où il abandonne la guitare et se retrouve donc à chanter entièrement sur une bande son. Ça donne l’impression qu’il est en train de faire un karaoké et on trouve ça un peu étrange. Vraiment, on aimerait voir ce que ça donnerait avec un groupe, le sentiment général serait à mon avis tout autre.

Voilà que la néo-zélandaise pénètre la scène.  Ses musiciens forment un arc de cercle autour d’elle, comme pour entourer sa voix d’un écrin musical. Elle démarre en interprétant “Ennui” et en se montrant relativement statique et gauche, attitude qui, quand même, la caractérise. Cette attitude, se mariant avec la simplicité des morceaux donne une atmosphère candide à la prestation, qui ne peut que nous mettre un sourire au visage.
Les différentes couches qui composent les morceaux sont en elles-mêmes relativement simples, mais une fois superposées, cela crée des motifs complexes, à la rythmique parfois difficilement lisible, mais assez hypnotisante. Elle a une palette vocale incroyablement variée, passant d’une voix d’alto chaude et suave, à une voix plus aiguë pour aller jusqu’à un timbre plus nasillard et enfantin. Elle module son timbre avec une telle dextérité que l’on se rend à peine compte du changement. Au fil des différents morceaux elle passe de la guitare au tambourin, au piano… Il est amusant de constater que lorsqu’elle s’installe derrière le piano, sa pianiste ne quitte pas la scène, mais reste tranquillement assise à côté d’elle. Le public se montre enthousiaste au moment où le groupe joue les premières notes de “The Barrel”. Entre deux morceaux, quelqu’un s’exclame “Welcome to Lyon !”, elle attend quelques secondes et finit par répondre d’un simple “…whatever”. Ca pourrait à première vue passer pour un léger manque de respect ou du je m’en foutisme, mais au fil du concert, on s’aperçoit que ça fait en fait complètement partie du personnage et que c’est ce qui la rend si attachante. On peut citer comme exemple ce moment où devant le silence assourdissant d’Harding entre deux morceaux, certains petits plaisantins dans le public se mettent à crier “ouais ouais ouais !”, ce à quoi elle répond de manière totalement hilarante par de petits “Yeah…!” ou “Ha…!”, tout en buvant son eau. On l’aperçoit plus tard jouer à pierre-feuille-ciseau avec avec le technicien qui récupère sa guitare, et on se demande ce qui peut bien être en jeu. Elle finit en interprétant “Leathery Whip” puis remonte vite sur scène sous les encouragements et les applaudissements du public qui réclame un dernier morceau. Le groupe interprète donc “Designer” pour conclure le set, avant de saluer le public conquis. En effet, comme on se le disait, Aldous Harding a parfaitement su nous faire oublier le froid et nous plonger dans son univers folk et dream pop où en l’espace d’une heure et demie, plus rien ne semble exister.

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