Texte : Jaap van Hamond

Le troisième album du jeune duo britannique de synthpop Let’s Eat Grandma montre le lien entre les deux meilleurs amis dans toute sa gloire paradoxale. Malgré le fait que sur Two Ribbons, le déclin de leur amitié soit central, le résultat est extrêmement cohérent et leur affection mutuelle semble plus forte que jamais.

Lors de la tournée de leur précédent album I’m All Ears, Jenny Hollingworth et Rosa Walton, inséparables depuis la petite enfance, ont remarqué qu’une brèche s’était ouverte entre elles. Dans une période de deuil, d’isolement et de changements individuels, elles ne se comprennent plus aussi facilement qu’avant. Elles commencent à écrire de la musique séparément pour la première fois, mais restent toujours dans les pensées de l’autre. C’est dans ces circonstances difficiles que les bases solides de Two Ribbons ont été posées.

L’album se compose en gros de deux parties distinctes, l’une avec de véritables tubes synthpop et l’autre avec des ballades plus introspectives. Le morceau d’ouverture « Happy New Year » est littéralement explosif, avec des feux d’artifice dans le pont, et les morceaux suivants brillent également par des synthés en écho, des boites à rythme épaisses et des voix fortes, complétés par des paroles chargées en émotion : « How I shake, how I shatter, as you’re tearing at the touch like butterflies », chante Hollingworth sur « Watching You Go ». À partir de « Insect Loop », l’atmosphère de l’album se transforme en un son plus mélancolique. La guitare occupe le devant de la scène dans cette chanson, avec de la place pour une belle mélodie et même un motif pincé plutôt folklorique. Les paroles prennent un caractère direct et conflictuel dans ce nouveau contexte instrumental : « Why do we both have to sit and absorb this ordinary pain? And how did it get to the point where it’s not an ordinary pain? » se demande Let’s Eat Grandma. « Sunday », un peu plus tard, présente un caractère éthéré, qui rappelle d’une certaine manière les meilleurs morceaux de Grimes, mais il est plus tendre dans le son et plus poignant dans l’émotion  « I feel my heart beat all the wrong ways, and say I miss you even though you’re right here ». D’une certaine manière, on pense aussi aux meilleurs morceaux de Coldplay, avec la mélodie de guitare perçante de « Insect Loop » et la montée en puissance cinématographique de « Strange Conversations ». La chanson titre, qui clôt l’album, évoque une dernière fois le lien spécial qui unit Hollingworth et Watson, au cœur de Two Ribbons, un album haut en couleur qui brille par ses déchirures inéluctables, sa profonde dévotion et sa vulnérabilité aiguë. Let’s Eat Grandma éclaire tous ces sujets sensibles avec une honnêteté claire et courageuse.

Let’s Eat Grandma est en tournée au Royaume-Uni, puis en Amérique du Nord. L’Europe ne devrait pas tarder à faire son apparition.

Transgressive Records